Sommaire

Présentation

  • Stéphane Despatie, Le travail souterrain des dialogues 3

Des textes de

  • Fredric Gary Comeau, Souffles (extraits) 5
  • Cristina Montescu, Chant à l’enfant qui ne naîtra pas 11
  • Audrey-Anne Marchand, Le naufrage du sens 21
  • Annie Lafleur, DRVAR (extraits) 27

Dialogue

  • Poèmes de Bulgarie
    Dossier préparé par Krassimir Kavaldjiev et Carole David, avec des textes de : Amelia Licheva, Aksinia Mihaïlova, Ekaterina Yossifova, Kristin Dimitrova, Violeta Christova, et Mirela Ivanova
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Le travail souterrain des dialogues


Les intuitions des poètes
sont les aventures oubliées de Dieu.

Elias Canetti

L’essentiel surgit souvent au bout d’une longue conversation.
Les grandes vérités se disent sur le pas de la porte.

E.M. Cioran

 

Pour entendre la conversation des poètes, inutile de veiller la nuit ou d’épier les tranchées, il suffit de s’abandonner aux résonances, parfois souterraines, de nos lectures qui nous habitent ou qui, sur le seuil, attendent encore. Au fil des numéros, Exit a ouvert ses portes à des poètes de plusieurs pays, ce qui, par la même occasion, a permis à plusieurs poètes québécois d’entrer, ne serait-ce que par le biais des exemplaires envoyés aux auteurs étrangers, et de se tailler une place dans les bibliothèques du monde. Ainsi, la revue a servi, si l’on peut dire, de sauf-conduit, entre autres, pour Haïti, le Mexique, la France, l’Italie, l’Uruguay, la Malaisie, la Catalogne ou l’Argentine. Ce type de dialogue voyage entre les frontières du travail, de la traduction, et permet de poursuivre l’échange parfois au-delà d’une simple publication en revue, ce qui, on en convient, est déjà beaucoup. De fil en aiguille, le dialogue passe par des invitations dans différents salons ou festivals, quelques fois aussi, on se rend jusqu’à la publication à l’étranger, mais surtout, de temps à autre, on participe à une réelle communion avec une poésie dont on ignorait presque tout au départ.

On l’a déjà souligné dans nos pages, publier des poètes étrangers est non seulement l’occasion de prendre le pouls d’une littérature, d’un univers, d’aller à la rencontre de l’autre, mais c’est aussi un moment privilégié pour aller au-devant de notre propre littérature, de la questionner, la repositionner. Le fait de lire les poètes étrangers, paradoxalement, nous rappelle de prendre rendez-vous avec notre poésie nationale. Dans le cas de la poésie québécoise, elle est jeune, certes, mais son évolution en un seul siècle est remarquable, et la production des dernières années est foisonnante et des plus intéressantes. Exit est aussi là pour le rappeler.

Dans ce numéro, vous pourrez entendre des voix émergentes : Annie Lafleur, Audrey-Anne Marchand et Cristina Montescu. Quant à Fredric Gary Comeau, malgré le fait qu’il soit né en 1970, il a plusieurs créations d’inscrites, et ce, depuis déjà plus de 20 ans. Une des caractéristiques notables dans les textes de Comeau, c’est que malgré (ou grâce à) sa condition d’auteur-compositeur de chansons populaires, sa poésie ne se teinte d’aucun effet de mode. Son écriture relève d’une expérience livresque, non du spectacle ou de l’oralité.

Dans la section « Dialogue », Carole David, en collaboration avec Krassimir Kavaldjiev, a dirigé de main de maître ce volet sur la poésie bulgare écrite par des femmes. Le plus ancien pays slave est le bassin d’une littérature riche et reconnue, que pourtant, on connaît mal au Québec. Vous serez peut-être surpris par la modernité des textes regroupés ici, poèmes qui ne détonnent pas avec notre production habituelle. De lire les poètes suivantes dans nos pages semble des plus naturel. Amelia Licheva, Aksinia Mihaïlova, Ekaterina Yossifova, Kristin Dimitrova, Violeta Christova, et Mirela Ivanova sont, à l’exception de Ekaterina Yossifova (née en 1941), toutes nées dans les années 1960. Elles ne sont donc pas très éloignées, au niveau de l’âge, des poètes publiés dans la section régulière du numéro et, d’une certaine manière, elles font aussi écho aux voix des jeunes femmes souvent publiées dans nos pages. Je vous invite donc à pénétrer dans ce chantier d’images et de vous abandonner à toutes ces formes et à tous ces univers aussi stimulants que différents.

Bonne lecture !
Stéphane Despatie