Sommaire
Présentation
- Stéphane Despatie, Écrire est une fête créole 3
Des textes de
- Annick Chauvette, L’être limite 7
- Dominique Robert, Leçons d’extérieur 23
- Alain Fisette, Grandes pattes de cirque . 33
- Robbert Fortin, Le souffle des morts 43
Dialogue
- Résonances haïtiennes
Dossier préparé avec la précieuse collaboration de Rodney Saint-Éloi
Des textes de : Gary Klang, Franz Benjamin, Emmelie Prophète,
James Noël, Makenzy Orcel, Jobnel Pierre, Joël Des Rosiers, Rodney Saint-Éloi 57
Écrire est une fête créole
Dans les gorges de Camacala
où l’herbe garde le goût du sel
et se refait une langue mémoire
sous les pierres de Camacala
dorment des ailes d’archanges
et veille le chant des cascabelles.
Anthony Phelps
jusqu’à la débâcle crépitante et grave qui jette les villes
naines à la tête des chevaux les plus fougueux quand
en plein sable elles lèvent
Aimé Césaire
Je viens de plus loin que ma force
Davertige
René Depestre, dans Le métier à métisser, racontait « [qu’]écrire est une fête : [que] c’est la meilleure façon de convertir l’angoisse en aptitude à la joie de vivre… ». Cette affirmation me rappelle une phrase d’Émile Ollivier, jaillie d’un entretien avec Jean Royer : « La joie littéraire, c’est mon obsession. Je viens d’une culture où la littérature est toujours en porte-à-faux. » Il affirmait du même souffle que l’écrivain « coincé dans une sorte de commande sociale », ne peut faire de littérature. Ce qui nous ramène à Édouard Glissant, qui confiait, à ce même Jean Royer : « Une littérature existe quand des gens dans un pays, violemment ou pacifiquement, contestent une œuvre ou bien l’exaltent publiquement. » Toutes ces paroles venues d’ailleurs ne peuvent que nous interpeller comme poète québécois, comme elles remettent sur la table ces cycliques interrogations sur la littérature et, par ricochet, sur la notion de pays. C’est pour ces ponts, ces questionnements, ces partages culturels, qu’Exit tient à faire, sur une base régulière, une place à la poésie d’origine étrangère. Dans ce numéro, vous pourrez lire huit poètes d’origine haïtienne : Gary Klang, Franz Benjamin, Emmelie Prophète, James Noël, Makenzy Orcel, Jobnel Pierre, Joël Des Rosiers et Rodney Saint-Éloi. Ils proviennent de différentes générations et abordent tous les thèmes, écrivent dans tous les styles. Précédant la section Dialogue intitulée Résonances haïtiennes, nous avons la chance d’offrir à lire des inédits d’Annick Chauvette, de Dominique Robert et d’Alain Fisette. Grâce à ces textes, se côtoient les thèmes de l’état limite, de la réalité, de la rupture, de l’amour et celui de l’écriture ou du moins de la résonance littéraire dans le monde et autour de nous. Le dénuement, l’humour et l’humour noir, le détachement, la distance, le tourbillon de la vie et le vertige viennent ici, influencer le souffle, l’emportement et surtout la forme. C’est d’ailleurs peut-être ce qu’il y a de plus remarquable chez ces trois poètes : cette manière de conjuguer le besoin de dire et l’avancée ou la position formelle. Écrire est une fête, disions-nous…
En terminant, je voudrais dédier ce numéro à la mémoire de Robbert Fortin, un ami et un collaborateur régulier de la revue, dont nous publions à nouveau un de ses poèmes, ainsi qu’à Aimé Césaire, poète martiniquais, tous deux décédés en avril dernier.
Bonne lecture !
Stéphane Despatie